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Les voyages, 2

 

Les étrangers(1) ne savent pas parler aux étrangers(1)

Vous avez quelques connaissances de la langue du pays dans lequel vous vous trouvez, bravo ! Mais avez-vous remarqué comme ces étrangers parlent vite et utilisent des mots ou des tournures inconnus ? Vous leur demandez de parler plus doucement et ils reprennent leur propos à la même vitesse en les accompagnant de périphrases dont ils pensent qu’elles vous aideront et dont le seul effet est de vous perdre un peu plus. Ils semblent penser que d’ajouter des propos à des propos pas ou peu compris est une aide, comme on aide en expliquant. Mais pour les langues étrangères, c’est tout le contraire. La seule aide possible est de simplifier. Les étrangers ne le savent-ils pas ? Les adverbes sont peu utiles. Les adjectifs feraient mieux de venir à part, après le principal, en complément. Les conjugaisons ne servent la plupart du temps à rien, l’infinitif est parfait. Et que dire des déclinaisons qui, comme les conjugaisons, prennent un malin plaisir à modifier les mots à tel point qu’on en perd jusqu’à la racine ?(2)

Quelques règles élémentaires devraient être mises en place pour les échanges simples.

- La première est gestuelle. J’avoue ne savoir dire dormir ni turc ni en albanais ni en grec ni en plein d’autres langues et, je ne devrais pas le dire, j’avoue aussi ne pas avoir progressé dans ce domaine. La raison est très simple : c’est si facile à mimer en désignant un endroit que l’interlocuteur comprend immédiatement qu’on demande à pouvoir dormir à l’endroit désigné. Qui arrivera à me faire croire que les mots droite et gauche servent à quelque chose ?

- Avant le départ, il faut apprendre les mots essentiels bonjour, au revoir et merci. Le reste est difficile à déterminer à l’avance et dépend du type de voyage donc de contact qu’on aura. Quelques verbes sont utiles, les éléments de conjugaison qu’on a du mal à retenir sont plus destinés à comprendre ce que l’on lit, peu ce que l’on entend, qu’à s’exprimer soi-même puisque l’infinitif suffit. Les compléments indispensables pour compléter l’infinitif sont les mots hier, aujourd’hui, demain, matin, soir. Les pronoms personnels ne servent à rien, même avec l’infinitif puisque leur absence peut être remplacée par un geste de désignation. En tant que touriste, des mots simples de géographie sont utiles, je pense à ville, village, colline, mont ou montagne, France, route, parfois rivière. La connaissance des petits nombres n’est pas inutile. Dans notre cas, cet ensemble a été complété par route, enfant, garçon, fille. Il s’est ensuite étoffé au marché et au bazar. Dans les pays autoritaires, il est impératif de savoir reconnaître le mot interdit.

Au chapitre de l’interincompréhension, impossible de passer sous silence les pays où on ne répond pas de façon négative parce que cela ne se fait pas. Il vaut mieux le savoir à l’avance parce que si d’aventure vous demandez votre route à quelqu’un qui ne sait pas, il ne dira pas qu’il ne sait pas et vous indiquera une direction. Cela donne parfois des situations cocasses. Vous vous trouvez en Asie centrale et vous demandez un lieu à trois policiers. Que voyez-vous ? Celui de droite tend un bras vers la droite, celui de gauche en tend un vers la gauche et le troisième prend un air embêté. Une chance qu’ils aient été trois car s’il n’y en avait eu qu’un, il aurait donné une direction aléatoire. Il faut reconnaître qu’elle aurait toutefois pu être exacte.

1 Qui est étranger ? Nous par exemple, qui ne sommes que 0,9 % de la population mondiale et presque tous les autres qui représentent 99,1 % de la population mondiale. Et qu’on ne chipote pas ces nombres, bien sûr quelques-uns parlent français, mais pas assez pour les changer substantiellement.

2 Deux exemples caractéristiques : le verbe islandais vinna (travailler) devient unnum (travaillons) à la première personne du pluriel au présent et kardan (кардан, faire) en tadjik devient mekynam (мекунам, je fais) à la première personne du singulier au présent. Imaginez la recherche dans un dictionnaire !