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France 2013

Cèpes

Nous en sommes à notre seconde balade de quelque importance depuis notre retour. Des balades agréables par un beau ciel pur et des températures correctes pour les efforts qu’elles ont nécessités. À dessein, les deux ont comporté une partie importante de forêt. Il s’agissait en effet d’une part de limiter les effets d’un vent assez fort et d’autre part de voir si les aléas météorologiques passés n’avaient pas retardé la sortie des premiers cèpes ou de girolles. Le bilan est mitigé : si le couvert forestier a bien retenu les élans d’Éole, les champignons n’étaient pas au rendez-vous, pas une girolle - une demi-surprise parce que c’est un peu tôt - et un cèpe, un seul, par sortie. Maigre récolte dirons les uns, un début dirons d’autres, qui sait ? Quoiqu’il en soit, à deux reprises, nous avons été touchés.

Lors de la première sortie, après quelques hésitations sur l’opportunité du ramassage, nous nous sommes penchés et l’avons pris avec nous. Aux alentours, pas un autre. La forêt était claire, de grands pins espacés dominaient un tapis d’herbes tendres d’un beau vert printanier, un milieu qui aurait dû favoriser la sortie et la croissance de compagnons pour ce pauvre cèpe esseulé. Qui cette situation n’émouvrait-elle pas ? J’entends de vilains esprits maugréer, qu’importe ! Ils peuvent bien penser qu’il aurait pu rester là, qu’on ne peut pas faire grand-chose avec un seul cèpe. Eh bien ils ont tort. Il aurait pu rester là, c’est possible, mais quelle solitude, quelle tristesse et, surtout, quelle fin pitoyable l’aurait attendu ! Quant à son utilisation, il y a des lustres que ce n’est plus un problème : nous l’avons apprécié à sa juste valeur d’autant plus qu’il n’était pas petit.

Aujourd’hui nos pas nous ont dirigés vers l’ouest. Cette fois-ci, le terrain était très différent. Un beau cèpe attendait en haut d’un talus presque vertical en bordure d’une petite route ensoleillée et fleurie au milieu d’une forêt. Le reste du scénario est identique ou, pire, encore plus pathétique. L’ennui et la solitude avaient déjà marqué de leur sceau hideux le beau chapeau, traçant de profondes rides dans la ravissante cuticule marron. Mettez-vous à notre place : auriez-vous laissé ce malheureux boletus edulis continuer à se morfondre ? Nous avons de nouveau laissé notre cœur parler et, malgré la difficulté à se rendre sur place, sommes allés le délivrer. La peine de l’infortuné champignon était telle qu’il avait caché son long pied dans le sol comme s’il avait conscience de son sort et avait renoncé à arborer toute sa splendeur. Le relief lui étant peu propice à cet endroit, la recherche a été réduite à des coups d’œil inquisiteurs de tous côtés qui n’ont hélas pas révélé la présence d’un seul autre. Quelle misère ! Les photos achèveront de convaincre les sceptiques, la première le montrant dans sa situation naturelle et la seconde le laissant voir tout fier de sa beauté retrouvée à notre arrivée à la maison. Que chacun imagine maintenant les soins que nous allons lui prodiguer et combien nous l’apprécieront, vraiment, une belle fin… Il est encore plus gros que le premier, vivement ce soir !