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Iran 2014

Les Iraniens sont sympas 1

D’ordinaire, les commentaires sur l’Iran commencent par ce thème tant il est vrai que ses habitants sont accueillants, hospitaliers et prêts à aider.

Première situation

Nous sommes arrivés hier. Aujourd’hui, nous devons changer un peu plus d’argent pour les jours à venir que nous passerons dans des régions non touristiques. Voici une ville, Khorramabad. La matinée est bien avancée lorsque nous y entrons et, pourtant, nous y trouvons une place en plein bazar du premier coup, il n’est pas sûr qu’il y en ait eu deux dans toute la ville, un vrai coup de chance. Nous  sommes sur une sorte de carrefour aussi vais-je demander si l’emplacement est correct au magasin devant lequel nous sommes. Pas de problème, je m’en doutais. Moins de 50 m en arrière, nous venons de passer devant, un bureau de banque, exactement ce qu’il nous faut. Nous y entrons, saluons (« Salam »), on vient à nous sans tarder, et demandons « Change? ». Notre interlocuteur principal est rapidement le jeune garde armé des lieux qui, contrairement aux autres, parle anglais. « Pas ici », ce n’est pas un problème, « où ? ». Une autre banque qu’ils nous indiquent.

Le garde se propose de nous montrer, il faut y aller en taxi. « Combien pour le taxi, aller, attente et retour ? » approximativement. Le prix de 30 000 rials qu’il donne sera sans doute la moitié de ce qu’on nous demandera. Il y au moins deux sortes de taxis ici, les jaunes omniprésents en ville et, dans une moindre mesure, à l’extérieur et d’autres. À côté du camping-car se trouve précisément un bureau de location d’une autre catégorie. Tout se passe sans que nous ayons un mot à dire et, en un sens, ce n’est pas plus mal, le jeune garde armé s’occupe de tout. Il repart à la banque et nous embarquons. Le chauffeur ne parle pas anglais et ne répond pas à ma demande de prix. Ils avaient parlé de 10 minutes à pied, c’est compliqué et pas si près que cela, la circulation n’aide pas. Le taxi stoppe devant un grand établissement bancaire, le chauffeur montre où il attendra.

Une fois à l’intérieur, même scenario que dans le précédent. On vient vers nous, nous posons la même question au gardien. C’est à l’étage, le gardien nous précède, c’est bizarre ces gardiens qui se déplacent, que gardent-ils au juste ? Très sympathique lui aussi, il nous conduit à deux hommes dans la quarantaine qui, s’ils étaient pris, laissent leurs affaires pour s’occuper de nous. Ils semblent embêtés. Nous n’avons rien compris de ce qui s’est dit et il n’a pas été nécessaire d’expliquer le but de notre présence, le gardien a dû s’en charger. Cette situation inconfortable parce que nous ne savons pas ce qui la motive dure quelques minutes, puis les deux hommes sortent un long listing de leur ordinateur, celui des taux de change, toute la planète doit s’y trouver. Ils nous montrent la ligne du taux de l’euro qui ne nous paraît pas bien intéressant et qui est inférieur à celui d’hier dans la rue, mais que dire d’un taux tout droit sorti des entrailles d’un réseau d’ordinateurs ? Cela ne leur rend pas le sourire. Ils parlementent. Une décision en sort que nous livre le gardien dans son anglais plus hésitant que celui du premier : le taux n’est pas intéressant, mieux vaut changer dans un bureau de change ou en privé. Extraordinaire ! Ce sont des employés de banque qui se chargent de détourner des clients. Les gardiens sont décidément bien libres puisque celui-ci, non armé, nous accompagne. Deux petits immeubles plus loin, un hall, des bijouteries d’une pièce chacune sur deux étages. Il va droit vers l’une d’elles, à l’étage. Deux hommes sont assis derrière un bureau, leur taux est 14 % plus avantageux, mieux que la rue hier, l’opération est rondement menée. Le gardien nous ramène au taxi qui n’était d’ailleurs pas là où il avait dit. Très satisfait de l’aide qu’il vient d’apporter, il tient absolument à pouvoir nous aider en cas de besoin et nous donne, à cet effet, son numéro de téléphone ainsi que celui de sa femme. Il aimerait nous inviter aussi, mais c’est trop compliqué parce que nous ne sommes pas libres, le taxi attend, que nous avons une autre démarche à faire et que nous ne souhaitons pas rester dans cette ville sans attrait pour en gagner une autre dans la journée. Merci, adieu et nous voici repartis en taxi. J’insiste un peu pour le prix. Il demande 50 000 rials, j’en propose 30 000 que je maintiens pendant presque tout le trajet. Il finit par téléphoner à une connaissance qu’il me passe et qui me dit en français que le prix est de 50 ! Inutile de continuer à marchander, il a gagné.
Nous retournons à la première banque, pour rien, juste afin de les remercier pour leur aide, le jeune garde surtout. Il se propose de nous aider, au besoin. Il n’en fallait pas plus pour que nous lui posions la question de l’achat d’une carte SIM puis de forfait pour notre portable. Miracle ! Le marchand de cartes SIM du voisinage est là et il en a une ! Affaire conclue immédiatement.
Pour l’activer, il faut se rendre à un bureau de la compagnie. Le garde se propose maintenant de nous accompagner, avec l’accord de ses chefs. C’est plus loin, nous traversons l’avenue et la remontons sur 500 m. Si nous entendons ce qui se dit autour à notre passage, seul le garde comprend : il doit s’agir de personnes importantes pour se déplacer en ville avec un garde armé (la mitraillette fait partie de l’uniforme). En fait, il fait son service militaire dans ce poste. Il est d’Ahvaz, nettement plus au sud, nettement plus chaud, ici, nous n’avons pas encore complètement quitté les montagnes. Au bureau, deux jeunes femmes en noir mais au visage découvert sont vite mises au courant de notre demande. C’est finalement pratique et cela accélère bien les démarches que d’être ainsi accompagnés, mais nous avons un peu honte. Eux ont l’air de trouver cela parfaitement naturel. La démarche est longue. Elle nécessite de compléter un formulaire ce que je suis incapable de faire, tout est en persan. Elles s’en chargent me demandant de temps à autre un renseignement, un nom, une signature… Cela dure tant que notre garde doit nous laisser pour rentrer à la banque avant sa fermeture. Merci à tant de dévouement désintéressé. Nous restons. Il faut une photocopie des certaines pages du passeport, le nom de mon père, tous renseignements que j’écris en caractères latins, incapable que je suis de les transcrire dans l’alphabet arabe. Le tout est faxé une première fois sans succès puis une seconde. Il reste à attendre d’une heure à un jour pour que la démarche permette l’activation. Nous achetons des unités sans arriver à savoir combien de temps nous pourrons échanger avec la France pour le montant choisi. Ces deux jeunes femmes, peu loquaces, mais leur anglais est bien réduit, sont restées pour nous alors que l’heure de fermeture est largement dépassée.

De l’aide bénévole en permanence,  cela se confirme tous les jours.