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Voyage de 2014

Semaine 6, Turquie

Lundi 5 mai

passage en Asie (photos)

9 h 01, départ. Nous passons le pont Galata puis remontons le Bosphore jusqu’au second pont, le Fatih Sultan Mehmet köprüsü, que nous avons choisi pour changer. Si jusqu’ici la circulation était normale pour un matin, la montée sur le pont et ses bretelles de raccordement sont bien encombrées. Par expérience, nous savons que le passage en Asie est payant et nous ne savons toujours pas comment faire pour payer. Une petite bretelle se détache sur la droite en direction de bureaux, dont un bureau de poste, nous y allons. Quand je dis à droite, rapidement, passant dessous, dessus tout cela sans arrêter de tourner, il n’est même plus certain que nous soyons à droite, peu importe. Effectivement, il se trouve bien un bureau. Malheureusement, impossible d’avoir le moindre renseignement si ce n’est qu’il ne se vend plus de carte de péage. Tant pis, au pire, nous nous ferons arrêter après le péage pour défaut de paiement. Retour dans la bousculade. Passage sous les portiques, comme tout le monde, rien, pas un feu rouge, pas un signal sonore, nous continuons dans la plus parfaite incompréhension. Sur le pont, pour profiter du paysage, je me traîne, comme toute le monde vu la densité de la circulation. Nous arrivons donc en Asie sans encombre. Il ne reste plus qu’à prendre la direction d’Ankara pour être sûr de ne pas nous tromper. Nous ne tardons pas à retrouver l’autoroute qui vient du premier pont et à partir vers l’est. Cette région est inintéressante au possible : industries et urbanisme tout le long, rien à voir, rien d’autre à faire que d’avancer aussi vite que possible pour y échapper. Il ne faut cependant pas nier que la Turquie fait des efforts d’embellissement de l’autoroute et ne néglige pas les alentours des zones urbanisées, nous voyons défiler des dizaines de kilomètres de fleurs et de pelouses bien entretenues qui rendent le parcours moins monotone. Un autre fait retient notre attention ce matin, la présence de policiers armés régulièrement disposés et de véhicules de police sur tous les ponts. Nous doutant bien que cette haie d’honneur ou de gardes n’a pas été déployée pour notre venue, nous nous interrogeons pendant un bon bout de temps. La réponse vient finalement de l’arrière. Des motards de la police, gyrophares allumés, font leur apparition dans les rétroviseurs. Ils n’ont aucun mal à nous dépasser et entendent bien avoir priorité, rappelant à l’ordre une grosse Mercedes qui doublait devant mais pas assez vite à leur goût en frappant son rétroviseur au passage. Ils sont rapidement – le mot n’est pas exagéré – suivis d’une cohorte de grosses berlines noires aux vitres teintées et puis tout rentre dans l’ordre, plus une voiture de police sur les ponts, plus de gardes le long des chaussées. Sans doute un homme politique important en déplacement, comment se fait-il qu’il ne voyage pas en avion ? Plus on s’éloigne du Bosphore, moins la circulation est dense. Par contre, la région demeure construite jusqu’au fond du golfe d’Izmit (İzmit). C’est par là que le ciel, de beau et clair, passe aux gris plus ou moins marqués, pas de chance, au moment où nous n’allons pas tarder à changer de paysage.

Nous quittons d’ailleurs l’autoroute d’Ankara peu après Sapanca pour partir vers le sud, les péages qui sonnent ou qui laissent passer sans aucun signal ne sont déjà plus qu’un souvenir ! Le ciel ne s’éclaircit pas pour autant. Ce n’est pas une autoroute, mais le gabarit de la route est exactement le même, la différence résidant dans les routes qui y débouchent et les maisons qui la bordent de temps à autre. Après la région de Sapanca et ses champs, elle remonte une vallée où alternent des collines couvertes de forêts et des espaces plats cultivées. Après Bilecik, nous repartons vers l’est, juste pour prendre une petite route pittoresque. Petit arrêt dans le village de Söğüt pour acheter du pain. Des enfants jouent dans le parc à l’entrée, de nombreux hommes sont aux terrasses des maisons de thé le long de la rue principale, les femmes sont absentes, peut-être aux travaux agricoles. Incorrigibles, tentés par ce qui est proposé, nous achetons plus que le nécessaire. Notre départ ne passe pas inaperçu : je donne les clés du camping-car à notre fille et tous les hommes la regardent étonnés prendre le volant et nous emmener. L’éclairage uniforme dû à la couverture nuageuse ne donne aucun relief aux paysages de la vallée du fleuve Sakarya et leurs lointains plus montagneux. C’est dommage. Nous devons nous contenter des cultures maraîchères intensives de la vallée sans profiter d’un bel arrière-plan. La route que nous prenons ensuite et qui franchit les collines marquant le versant sud de la vallée débouche sur une plaine en pente qui s’étend à perte de vue. Ici, avec le beau temps retrouvé, place à de grands champs bien verts. Entre le relief et la ville d’Eskişehir, nous ne trouvons pas d’emplacement pour la nuit, l’agriculture occupant tout l’espace et les rares villages étant assez serrés, et nous voici arrivés aux portes de la ville. Nous partons vers la droite, il se trouvera bien une grande station-service le long de la grande route. Effectivement, nous n’avons pas à chercher beaucoup qu’il s’en présente une. Elle est beaucoup plus vaste que tout ce que nous imaginions puisque le parking s’étend jusque devant une usine désaffectée. L’air est vif et frais, nous serons très bien.

Mardi 6 mai

petites villes de l’ouest de l’Anatolie (photos)

Tiens, le parking a été choisi par bon nombre de chauffeurs de poids lourds pendant la nuit. Il fait très beau, une belle journée de route s’annonce donc. Nous sommes prêts de bonne heure pour en profiter. N’étant pas sur la bonne route ni dans la bonne direction, nous avançons un peu pour aller faire demi-tour plus loin où la séparation des voies est ouverte pour laisser les usagers entrer, sortir ou tourner. Il n’est pas plus nécessaire d’entrer dans Eskişehir qu’hier soir, nous prenons une route secondaire vers l’ouest à travers la campagne, de grandes ondulations aux terrains préparés pour la culture dont émergent de temps à autre des collines plus champêtres.

Nous avons tôt fait d’arriver sur la route de Kütahya. Ici, le paysage évolue, la vallée cultivée est plus resserrée et les collines plus marquées. Un grand lac de barrage et nous arrivons en ville. Il est encore assez tôt pour que l’activité ne gêne ni la circulation ni le stationnement à moins que la ville ne soit paisible tout le temps. Le nombre de commerces entrevus, son nom, nous incitent à y faire une halte. C’est une bonne idée, non que nous cherchions à voir absolument les quelques édifices anciens qu’elle recèle, mais juste pour le plaisir de découvrir une petite ville et de bénéficier ne serait-ce qu’un peu de son atmosphère tranquille et de ses activités ordinaires. Une partie de son bazar borde une longue rue piétonne, des ateliers de ferblanterie une autre où nous regardons les ouvriers travailler, des bijoutiers une autre encore… Et puis, les böreks tout frais, tout chauds sont excellents bien que l’heure pour en déguster ne soit pas idéale ! Nous repartons parce qu’il faut bien avancer un peu.

La route jusqu’à Afyonkarahisar ne présente aucune difficulté, nous y arrivons d’autant plus rapidement que le paysage varie peu, trop peu pour provoquer des arrêts répétés. Le centre-ville est dominé par l’imposante silhouette de la forteresse perchée au sommet d’un rocher escarpé. Sans être simple, la recherche d’une place ne nécessite pas d’aller-retour. Première rue de bazar : des bijouteries, comme c’est souvent le cas, avec la particularité d’être entrecoupées de boucheries et de commerces de fromage, une touche d’originalité que nous n’avions pas encore rencontrée. De belles boutiques avec de belles devantures, de beaux éclairages, de beaux comptoirs et, ne l’oublions pas, des produits appétissants, je ne parle pas des bijouteries, bien sûr. La diversité des fromages et fromages blancs est étonnante, des chapelets de saucisses (sucuk) en vitrine et à l’extérieur appâtent les clients. Les clients potentiels que nous sommes ne marchent pas fièrement sans y prêter attention, mais se disent que cela peut attendre le retour au camping-car. Au bout de cette première rue, une place, jet d’eau, mosquée puis une autre rue et des ruelles du bazar encore, nettement moins luxueuses. Ici, pour la plupart, les saucisses pendent devant les échoppes ajoutant une touche pittoresque au décor. Nous nous dirigeons vers un quartier, au sud du château, dans lequel un bon nombre de belles constructions ottomanes demeurent, certaines en l’état, d’autres restaurées. Les murailles de la citadelle semblent planer au-dessus des courtes ruelles qui mènent à l’éminence sans l’atteindre. Un peu plus haut, des enfants, en récréation dans la cour, ont vite fait de repérer la présence d’étrangers et ils sont un bon nombre à venir nous poser les questions usuelles, notre nom, notre pays… mais une femme Turque qui remonte la rue derrière nous les interpelle et, nous le supposons, leur intime l’ordre de nous laisser tranquilles, ils repartent tous. Ils ne nous dérangeaient pas mais nous ne nous mêlons pas des remarques qu’elle leur fait. Elle nous rejoint et nous propose d’aller visiter un centre d’artisanat dans un bâtiment ancien juste à côté. Nous en ignorions la présence, nous le découvrons, visite guidée qui plus est. Ce sont des groupes de femmes qui, sans marquer trop de surprise et sans se voiler ostensiblement, nous accueillent à tour de rôle pour nous faire découvrir leurs travaux. Ce n’est pas un lieu de vente et personne ne parle d’achat. Ensuite, nous retournons tranquillement par d’autres rues, toujours au milieu de ces belles maisons. Lorsque toutes auront été réhabilitées, le quartier, déjà agréable, ne manquera pas de charme. Il est d’autant plus intéressant que ce n’est pas un quartier touristique mais un quartier d’habitation. Qui dit retour, dit arrêts et, cette fois, nous ne passerons pas devant les saucisses sans en acheter. Ce sont des saucisses de viande rouge séchée et épicée. Plus loin, halte pour les fromages. Venant d’une région productrice de fromage, nous n’avons pas un enthousiasme fou pour les fromages turcs, mais à voir la richesse des étalages, il est difficile de résister. Après avoir pris de petites quantités de plusieurs fromages et de fromages blancs, nous retournons sans avoir escaladé la montagne. La pente est certes dissuasive, mais la vraie raison se trouve plutôt dans notre envie d’arriver à Pamukkale avant la nuit.

Cap au sud. Les paysages ressemblent à ceux de ce matin, des champs de céréales pour la plupart, bien vert à cette saison, des collines plus sauvages sur le pourtour. Le bel éclairage dont nous bénéficions et un beau ciel pur rendent le trajet plaisant. À mi-chemin, nous mettons le cap à l’est en direction de Denizli. La couleur change puisque, plus nous avançons et plus les champs de pavots prennent d’importance, cette époque de floraison fait alterner des champs blancs et des violets foncés. L’autre fait remarquable de cette partie de trajet est le lac Acıgöl, un lac salé que la route suit d’assez près pour en profiter. Le lac en lui-même n’est pas très étendu, mais les croûtes de sel d’un blanc étincelant en marquent les rives sur de grandes surfaces. Le sel est exploité par endroits hélas trop éloignés pour les détailler. Pour Pamukkale, inutile d’entrer dans la grosse ville de Denizli puisque la route d’accès prend sur la droite avant d’y parvenir. Cette grande route, d’une largeur impressionnante pour un simple accès à un village, traverse la plaine en une ligne droite au bout de laquelle les formations de travertin d’un blanc qui commence à prendre des teintes de couchant émerge d’une plaine toute verte de ses plantations de grenadiers. Le village est construit au pied des collines. A-t-il d’autre but que le tourisme ? Ce n’est pas certain. Heureusement, à cette heure, plus aucun autocar n’est là et la promenade dans le jardin de roses au pied des formations qui s’illuminent au soleil rasant est des plus agréables. Par curiosité, nous allons voir un camping, juste en face. Les tarifs ne sont pas prohibitifs, mais nous n’avons besoin de rien, le camping n’est pas encore ouvert, on est prêt à mettre les installations sanitaires en marche pour nous, nous partons ailleurs, dans la nature. Le ciel reste d’une pureté exceptionnelle, la nuit sera calme. Nous nous installons au bord de la route, non loin de l’entrée supérieure du site, du côté de Hiérapolis, en plein soleil, au milieu des fleurs sauvages, avec une belle vue sur toute la plaine, les montagnes en face, les formations de travertin à l’arrière, pas de quoi nous plaindre.

Mercredi 7 mai

Pamukkale, Kuşadası (photos)

Voisins du site comme nous l’avons été cette nuit, nous y entrons tôt, dès l’ouverture, à la fois pour profiter du bel éclairage matinal et de la relative rareté des visiteurs avant l’arrivée des groupes. Étant du côté de l’entrée ouest par Hiérapolis, nous sommes seuls. Après le parking, une allée serpente dans la nécropole. Les monuments funéraires – beaucoup ont la taille d’abris de jardin, mais des abris en pierres taillées et appareillées – semblent avoir été bousculés ou soulevés par des forces occultes, ce qui donne au site un aspect chaotique. Les premières vasques arrivent, personne ne vient par ici, tous se concentrent dans la partie principale bien qu’ici l’eau claire et tiède coure au sol, s’écoule d’une vasque bleutée dans une autre et dépose son travertin d’un blanc aussi pur et aussi étincelant que dans la partie où les touristes s’agglutinent. Quelques monuments funéraires sont pris dans les concrétions. Des arbres et des pelouses agrémentées de rangées de rosiers aux inflorescences rouge vif rendent l’endroit des plus agréables. À l’arrière se dessine l’arc de la partie principale du site. Sans l’envie d’aller revoir le reste dont les parties les plus élevées du site historique, nous y passerions la journée. Nous y allons en suivant le bord des dépôts de travertin. Avec la vue qui porte de la plaine en contrebas jusqu’aux montagnes du fond, c’est toujours aussi joli. L’arrivée sur la partie principale, le grand arc blanc qui monte de la ville jusqu’ici, coïncide avec le déferlement touristique. Des autocars doivent être en train de déverser leur cargaison humaine, on se dévêt, on cherche sa place dans l’eau tiède et on s’installe. L’étalage de graisse multinationale et polyglotte est impressionnant. Nous partons nous promener plus loin, au-dessus d’autres vasques tout aussi belles mais interdites, la nature y est plus intéressante. Il y a deux ans, nous étions venus dès l’heure d’ouverture, nous avions bien fait. Aujourd’hui, le soleil, plus haut, éclaire tous les recoins, mais dans le choix entre l’arrivée du soleil ou celles des troupeaux de touristes, je n’hésite pas. Tout n’est cependant pas négatif parce que, bien aménagé et joliment fleuri, le rebord du site est remarquable en lui-même, pour les vues qu’il offre sur l’ensemble et pour les paysages environnants. Nous partons ensuite à l’assaut des hauteurs de Hiérapolis, à commencer par son théâtre que nous souhaitons revoir. Sans surprise, dès qu’on s’éloigne, d’autant plus qu’ici, s’éloigner est monter en plein soleil, le nombre de visiteurs chute. Les travaux sur la scène de l’amphithéâtre ne sont pas terminés, il n’empêche que le décor de scène vaut le déplacement. Nous allons aussi voir le Martyrium de Saint-Philippe, plus loin, plus haut, nous n’y sommes pas seuls mais c’est respirable. Si les restes sont réduits, la promenade dans la nature et les points de vue sont agréables. Passage dans la rue entre la porte de Domitien et la porte Byzantine, un très bel ensemble bordé de colonnes et limité par ces deux portes. Vêtu court, on parle une langue slave.

Voilà bientôt trois heures que nous parcourons le site, il est l’heure de reprendre la route. Cela consiste au début à retourner à Denizli pour quelques achats puis à partir en direction de l’ouest. La température monte, nous quittons en effet les reliefs pour suivre une longue plaine et le soleil est bien haut. Des champs accompagnent le voyageur, un large canal d’irrigation a pris la même direction. En avançant plus à l’ouest, les arbres sont plus nombreux, des cerisiers et des figuiers surtout. Si, à cette saison, il est trop tôt pour trouver des figues, il n’en est pas de même des cerises, des kiosques sont installés tout au long de la route. On y vend aussi des fraises. Nazilli, Aydın, les villes passent, nous allons jusqu’à la mer, à Kuşadası. Nous quittons donc la grande route, traversons quelques collines boisées pour parvenir dans cette station balnéaire chic de la mer Égée. Après avoir trouvé une place sur le boulevard en bord de mer, nous partons à la découverte. Première balade en bord de mer que bordent des bassins du port et d’impeccables constructions à caractère touristique. Le temps qui est resté superbe toute la journée et le soleil, loin au-dessus de la mer, sont avec nous. Nous avons beau être en bord de mer, une sorte de Côte d’Azur, l’atmosphère reste paisible, la circulation limitée et les promeneurs peu nombreux, c’est très agréable. Avant de poursuivre la balade, nous nous posons la question de la nuit pour nous décider à prendre l’un des campings en face. Pendant que le reste de la famille continue la promenade, je vais voir. Accueil chaleureux, prix tout à fait correct, installations sanitaires propres et fonctionnelles, en plein milieu du village, en face du front de mer, c’est bon. Je vais chercher le camping-car et prends place. Les campeurs viennent de partout. Un couple de Néerlandais avec un camping-car énorme vient ici tous les hivers, sans vouloir dire du mal des Pays-Bas, il est certain qu’ici sous le soleil ils trouvent un train de vie à la fois calme et bon marché peu comparable avec celui de leur pays. Plus loin, une famille slovaque, des Italiens… au total, peu de monde malgré les caravanes qui sont et restent sans doute stationnées ici à l’année longue. Je retourne sur le bord de mer à la recherche de la famille qui ne savait même pas dans quel camping j’étais entré. Un petit tour de présentation du camping et nous repartons nous balader le long de la mer et dans le petit bazar touristique. Comme à beaucoup d’endroits en Turquie, du matériel flambant neuf d’exercice physique personnel a été installé. Il n’est pas rare d’en voir dans des villages et de constater que les habitants en font usage au cours de leurs promenades, ici, c’est en bord de mer. Plus loin, un vendeur de moules cuites attend des clients et, partout, des gens sont installés sur les bancs publics pour admirer le soleil couchant et la mer qu’il teint de reflets dorés. Au bout de la baie, une colline au sommet arboré sur le flanc de laquelle s’accroche le vieux village. Sa découpe vue de la mer aurait donné son nom à la station, Île aux oiseaux, bien que ce ne soit pas une île. Nous profitons au maximum du temps agréable de la soirée, bien conscients que c’est la dernière vraie soirée ensemble puisque, demain, nous devrons nous trouver aussi près que possible de l’aéroport d’Izmir (İzmir).

Jeudi 8 mai

Éphèse (photos)

Ce matin, départ tranquille, nous n’allons pas loin. Quelques collines à passer et nous sommes sur la route de Selçuk. C’est le nom du village près duquel se trouve le site d’Éphèse. En arrivant par le sud, le site se présente avant le village lui-même. Inutile de chercher, c’est l’un des sites antiques grecs les plus visités. Nous prenons une place à l’ombre dans le parking du bas et partons à la découverte. Nous n’y serons pas seuls si l’on en croit le nombre d’autocars et autres minibus qui attendent. La ville a été construite au pied de deux collines basses peu séparées et dans le passage entre celles-ci et une autre, plus élevée, à l’est. Une belle allée bordée de grands pins conduit aux premières constructions. Le regard est vite attiré par le théâtre dont l’ovale semble avoir été excavé dans la base de l’une des collines. Il faut reconnaître aux anciens un don ou un art dans l’intégration des gradins au relief et au paysage. Bien conservés, il est possible de s’y promener et de jouir du spectacle qu’ils offrent sur cette partie du site, en particulier sur le pavage de la longue Voie Arcadiane qui menait à la mer. Sur la gauche, des enfilades de colonnes le long de la Rue de Marbre captivent le regard et l’entraînent vers des constructions dont il ne reste plus que les bases, la bibliothèque de Celsus, notre prochaine étape. La très belle façade aux nombreuses sculptures domine la cour du haut de quelques marches. Bien venues, ces marches, car elles permettent d’admirer la construction sans être trop gêné par la foule. On se presse en effet ici, mais ce n’est rien en comparaison de la Rue des Courètes qui ressemble à une sortie de métro parisien à l’heure de pointe, les groupes s’y succèdent sans discontinuité. La vue en est étonnante dans la mesure où la rue descend et que, du bas, la vue porte jusqu’en haut. Impensable de rester ici, nous nous réfugions sous la toiture des maisons en terrasse, un vaste chantier de fouilles de riches maisons décorées tout en étages. Les peintures murales rivalisent avec les mosaïques au sol. En ressortant, le flux de visiteurs semblant s’être réduit, nous pouvons monter dans la ville haute en espérant voir, tout simplement voir. En fait, les groupes ne s’attardent pas, passant rapidement d’un endroit à un autre, sans pause ailleurs, ce qui laisse tout le loisir de parcourir tranquillement le dédale de colonnes et de pierres sculptées puis de redescendre. Nous terminons par l’Église des Conciles, plus pour faire une promenade que pour l’église en elle-même.

Nous allons ensuite faire un tour dans le village de Selçuk. Encore un paisible village dans lequel il fait bon se balader et où il n’est pas possible de passer devant toutes ces fraises, ces cerises, ces oranges ou ces tomates sans en acheter, comme nous n’avons pas su rester indifférents aux pains frais d’un boulanger. En route ! Direction Izmir par la campagne. Malgré les villages, l’habitat est plus dispersé. Les champs occupent toutes les parties planes tandis que de petites forêts, comme des touffes vert sombre, couvrent les reliefs. Nous allons jusqu’à l’aéroport pour nous rendre compte du trajet que nous devrons faire demain matin avant le lever du jour. C’est là que nous décidons de prendre un parking pour la nuit, nous serons sur place et il y a fort à parier que ce sera assez peu mouvementé pour y dormir comme il faut. Pour l’instant, nous allons passer la soirée à l’ombre de grands arbres devant un cimetière et revenons la nuit tombée. Effectivement, il est non seulement possible d’aller à pied aux guichets d’enregistrement, mais en plus, les lieux bénéficient de toutes les commodités sanitaires nécessaires, le confort !

Vendredi 9 mai

cap à l’est (photos)

Comme prévu, sur ce parking réservé aux bus et autres véhicules hors gabarit, la nuit a été calme, des avions ont bien décollé tard le soir mais sans gêne pour nous. Il fait nuit noire, l’embarquement doit avoir lieu vers 6 h, il faut y aller. Nous accompagnons les voyageurs jusqu’à ce que nous ne puissions plus les suivre.

Nous attendons encore une bonne demi-heure avant de reprendre la route. Le jour s’est levé mais le ciel est si sombre que c’est un simple prolongement de la nuit. Commençant par la traversée d’Izmir, plus de 1 600 km, la Turquie d’ouest en est, nous attendent. La voie rapide est très chargée, on y roule au pas. La traversée de la ville dont nous ne voyons rien dure une éternité, nous avons hâte d’en sortir. Izmir est une ville portuaire importante, le trafic en témoigne tout comme la longueur de sa zone industrielle. La route va être longue, mais elle est facile à trouver et à suivre, comme un grand axe qu’elle est. À la sortie de la ville, elle monte dans des collines surmontées de nuages noirs. D’autres nuages, plus bas encore, apportent la pluie. Puis, le plafond étant encore descendu, c’est dans le brouillard et la pluie que nous poursuivons. Le seul avantage de la situation est de nous permettre d’avancer sans nous préoccuper du paysage peu visible dans ces conditions. Heureusement, les nuages au niveau du sol disparaissent assez vite pour nous permettre de rouler en sécurité, il ne reste que la pluie. Des villes passent, nous continuons, n’envisageant aucun arrêt avant Afyonkarahisar où nous sommes passés mardi. Déjà plus de 300 km et il pleut toujours. Nous entrons en ville et trouvons une place dans la rue principale. Au programme, de la saucisse et du fromage pour la suite. Des courses sous le parapluie, lui-même sous les auvents de magasin, et les gouttières qui déversent leurs eaux sur les trottoirs.

Nous reprenons la route dans l’intention d’aller jusqu’à Konya. La pluie finit par cesser et c’est sous un ciel gris noir que nous entrons en ville. Nous sommes impressionnés par la banlieue nord : les voies de la large avenue qui mène au centre sont séparées par une pelouse fleurie au milieu de laquelle montent et descendent des tramways neufs. Les immeubles, de part et d’autre, semblent tout neufs aussi. Le plus frappant dans les constructions récentes des villes turques est le degré de finition des travaux, toujours des pelouses, des fleurs, des arbres, des allées ou des bassins, aucune zone ne semble laissée à elle-même. À la recherche d’une place et après être entrés, puis ressortis en marche arrière, dans un parking souterrain, nous finissons par trouver juste en face du tekke de Mevlâna que nous avions visité il y a deux ans. Aujourd’hui, pas question d’y entrer, nous ne pourrions être que déçus, il faisait si beau… non, il s’agit plutôt de se promener en ville et surtout dans son bazar pour nous dégourdir les jambes. Nul besoin de guide, nous partons. Bien sûr, nous aimerions retrouver le petit magasin où nous avions acheté des abricots secs excellents, un autre pour des pois chiches grillés, mais ne cherchons pas pour l’instant. Ce bazar n’est pas le plus beau du pays avec ses rues bien droites, ses magasins bien alignés entre lesquels des toiles blanches ont été tendues pour limiter les ardeurs du soleil, peu importe, on y trouve presque une atmosphère campagnarde malgré le million d’habitants. Des marchands ambulants poussant leur gros chariot à roues proposent les premiers pois chiches frais. Les pieds sont arrachés, liées en petites bottes et vendus tels quels. Les gousses sont peu nombreuses par pied et chacune ne contient qu’une graine. C’est suffisant pour grignoter dans la rue en déambulant. Finalement, nous repartons sans fruits secs, il n’aurait pas été raisonnable de nous charger maintenant alors que la route est encore longue et que nous aurons de fortes chaleurs à supporter. Ne comptant pas passer la nuit en ville le long d’un trottoir, nous commençons à nous éloigner du centre lorsque notre regard est attiré par un panneau insolite : ici en tout cas, nous n’en avions encore jamais vu, c’est un panneau d’aire pour camping-cars. Nous en ignorions l’existence en Turquie. Suivons-le ! Cela tombe bien c’est dans la direction à prendre pour partir. Au boulevard périphérique, nous voyons le parking, à l’opposé le long d’un rond-point. Le risque d’un peu de bruit est évident, mais, sans aller voir, difficile de savoir. La recherche de l’entrée, dans une petite rue à aller prendre plus loin, n’est pas évidente mais nous ne comptons pas les demi-tours en voyage. Barrière. Je descends pour l’ouvrir puisqu’il y a des camping-cars à l’intérieur. Un gardien arrive, tout content d’ouvrir à des étrangers. C’est gratuit, tout est gratuit, électricité, toilettes, douches. Des emplacements sont matérialisés au sol, nous nous installons pour la nuit. Les voisins, deux camping-cars hors d’âge immatriculés à Istanbul, viennent rapidement faire connaissance. Nous bavardons de voyages, de leur pays et ils nous apprennent qu’il ne faut pas envisager d’aller en pays à majorité kurde, citant un grand nombre de villes par lesquelles nous souhaitions passer au retour. Pour l’aller, pas de problème, pour le retour, il sera temps de voir lorsque nous nous en approcherons. Très sympathiques, si le temps avait été plus clément, nous serions restés plus longtemps à bavarder, il ne pleut pas mais le vent est frais et le ciel reste menaçant. Du côté des installations sanitaires, ce n’est pas le luxe. Il s’agit de bungalows de chantier aménagés. Il semble que tous les tuyaux d’eau propre fuient, l’eau est omniprésente, on patauge. Pour la douche, la température extérieure nous dissuade, nous resterons chez nous. Pour le reste, nous nous accommoderons. Nous ne sommes vraiment pas loin du rond-point mais le bruit est tout à fait supportable. Ce stationnement nous aura donc permis de bavarder et d’éviter la recherche près d’un village plus loin.

Samedi 10 mai

de Konya à Adana (photos)

La nuit a nettoyé le ciel. Beau ciel pur et température encore fraîche. Nous partons tôt, les voisins n’ont pas encore bougé. Pour quelques arrêts-photo, le changement de temps a une incidence immédiate sur notre façon de progresser. La route est par ailleurs excellente, à deux fois deux voies séparées, comme hier. Nous avançons malgré tout rapidement et à tel point que tout à coup, alors que nous sommes sur le plateau anatolien plutôt avare en cultures et végétation, des policiers nous font signe de nous arrêter. Je n’ai pas vu la voiture radar, nous roulions bien, mais à combien ? Mystère. Nous attendons, un policier arrive. Merhaba, bonjour. Il parle, nous ne comprenons pas. « Do you speak english? » LA question. « Deutsch? » On ne sait jamais, les Turcs sont très nombreux à être allés ou à vivre en Allemagne. Non plus, pas de chance, à moins que ses connaissances ne lui permettent pas de répondre par l’affirmative. Il me fait signe de le suivre. Je prends les papiers et vais à leur voiture, ils sont deux, l’autre ne dit rien. Le premier me dit que nous faisions du 101 km/h et que la vitesse limite pour les kamyonet (prononciation évidente) est de 100 km/h. Coût : 172 livres, c’est très cher, une soixantaine d’euros, surtout pour un dépassement de 1 km/h. J’essaie vainement de lui faire dire que, pour si peu, c’est exagéré. Je dis vainement parce qu’il est insensible à un tel argument de bon sens et non parce qu’il n’aurait pas compris, j’ai les mots turcs pour l’exprimer. Il complète un formulaire, sans doute la contravention, ce qui ne m’empêche nullement de continuer dans le même sens. Je viens au moins d’apprendre une chose, la vitesse limite qui nous est appliquée, un point pas clair dans les indications routières. Je me doutais qu’il y avait plusieurs catégories de véhicules et donc de vitesses mais ne les connaissais pas, en voici une. Évidemment, trouver les renseignements à porter dans le formulaire parmi tous nos documents en français n’est pas simple et prend du temps. Il prend son temps, je l’aide là où je peux. Lorsqu’il a terminé, il me rend les papiers, me tend le sien et me dit au revoir. Je lui fais signe pour le paiement, il répond par un signe que non. Pourquoi ? Je n’y comprends rien, ils mettent leur moteur en marche et partent. Je n’y comprends vraiment rien. Il ne reste plus qu’à considérer le document comme une mise en garde ou un souvenir puisqu’il ne comporte ni adresse de paiement ni indication de paiement différé. Nous reprenons la route aussi, à un peu moins de 100 !

Au loin, commence à apparaître une chaîne de montagnes enneigées, le Taurus central ou Ala Dağlar, qui barrent l’horizon. Elles marquent l’endroit où la route obliquera vers le sud. De temps en temps les minarets de la mosquée d’un village dépassent sur ce fond de décor, c’est très joli. Nous finissons par rejoindre la route par laquelle nous étions descendus de Cappadoce à la Méditerranée. Elle descend non seulement vers le sud comme on dit souvent mais aussi et surtout parce qu’en suivant une vallée, elle quitte le haut plateau anatolien pour atteindre le niveau de la mer. Nous rejoignons aussi l’autoroute que nous prenons pour gagner du temps, ce que nous n’avions pas fait. Nous la quittons cependant à Tekir, un peu au sud de Pozantı, pour faire le plein. Passage du péage, rien, c’est parfait. Tekir est un gros village où nous trouvons la station-service que nous voulions et où des carcasses de mouton fraîche sont accrochées devant un restaurant sans que nous sachions si elles sont destinées à appâter les clients ou si elles attendent d’être remisées en chambre froide après livraison. Toujours est-il que les délicates gouttes de sang qui s’écrasent sur le trottoir sont du meilleur effet ! Retour à l’autoroute. Après quelques collines boisées, arrive la plaine côtière et l’autoroute vers l’est. Nous la prenons, pas longtemps, jusqu’à Adana, la grande ville toute proche.

La route principale la traverse. Aménagée en voie rapide, elle passe tous les carrefours en souterrain, nous devons en sortir pour trouver ce qui nous amène ici, un bureau de télécommunication pour renouveler notre forfait turc et une cabine téléphonique. Premier point, le repérage, second, le stationnement. Tout se passe bien si ce n’est que la seule place visible se trouve devant un feu rouge au carrefour de deux voies rapides, non loin du panneau d’interdiction de stationnement. En conséquence, je pars seul de sorte qu’un éventuel policier voie que nous n’en avons pas pour longtemps. En fait, si ! Pour les unités de communication téléphonique, personne ne parle anglais, mes connaissances en turc dans ce domaine ne sont pas suffisantes, c’est un peu compliqué et, comme toujours en pareilles circonstances, je finis par prendre au hasard sans savoir si nous pourrons utiliser le forfait à l’étranger ni, dans ce cas, quel sera le coût des communications ou des messages. Même si les échanges avec les jeunes employées sont difficiles, au moins ai-je le plaisir de constater qu’elles s’efforcent de donner satisfaction. Ensuite, cabine téléphonique. Elles sont nombreuses sur le trottoir devant la mairie. Je prends la plus à l’écart pour être moins gêné par le bruit de la circulation. Appel à l’Automobile-club de la République islamique d’Iran à Téhéran, aujourd’hui samedi, premier jour de la semaine là-bas. J’ai quatre numéros de téléphone, voyons le premier. On répond. Toujours la même question : « do you speak english? » « Yes ». Question simple maintenant : est-il possible pour un couple de Français d’entrer en Iran par un poste frontière Irak-Iran avec un véhicule immatriculé en France sachant que nous avons tous les documents nécessaires. Avant le départ, nous avons en effet trouvé sur un blog que cela avait posé bien des problèmes à un couple de Néerlandais en mars, leur page était intitulée Stress at the border, alors autant savoir à l’avance. Je sens de la perplexité au bout du fil, la question ne doit pas se présenter souvent. On me passe une autre personne, même question, un début de réponse, un timide assentiment, on me passe une autre personne… j’en ai ainsi quatre ou cinq ou plus et je dois reposer la question à chaque fois, la réponse est un peu plus affirmative sans aller jusqu’à être franche, on ne voit pas pourquoi ce ne serait pas possible. En attendant, ce que je vois clairement, c’est que le forfait va être rapidement épuisé et que je n’aurai pas la réponse. De fait, au bout d’une vingtaine de minutes, la communication est coupée. Inutile d’aller recharger le forfait, je n’en saurai pas plus et nous nous lançons comme si la réponse avait été oui. Nous retournons sur l’autoroute et poursuivons vers l’est jusqu’à ce que l’heure veuille que nous en sortions pour aller chercher un emplacement pour la nuit. C’est à Bahçe, au pied de collines boisées, en face du village que nous trouvons. Ce sera d’autant plus calme que l’essentiel du trafic reste sur l’autoroute.

Dimanche 11 mai

sud-est du pays (photos)

Dimanche, ce matin nous partons encore plus tôt parce que nous espérons aller jusqu’à Mardin aujourd’hui de façon à passer au garage demain matin. La route passe les collines avant de redescendre sur une plaine que les rayons d’un soleil radieux illuminent. Nous y retrouvons l’autoroute. Très peu de circulation. Les paysages évoluent lentement, passant de champs aux cultures variées à des terrains plus arides voués à la culture de pistachiers dans les parties les moins sèches ou les faisant alterner selon les canaux d’irrigation. Nous passons en effet l’Euphrate au pied d’un barrage et traversons des canaux. De petits regrets, ceux de ne pas avoir le temps de nous arrêter à Gaziantep ou, surtout, à Şanlıurfa après laquelle nous retrouvons la route « normale » qui a tout de l’autoroute plus les traversées de ville et les routes et chemins qui y débouchent, comme souvent finalement. La fin de l’autoroute marque, pour nous, la fin des retentissantes sonneries qui ont accompagné tous nos passages de péage ce matin. Nouveau plein à Viranşehir. Nous sommes les seuls à le faire dans cette station-service et, pourtant, il s’y trouve un monde fou, des hommes, tous bien vêtus. Le thé arrive dès que nous sommes arrêtés, des petits gâteaux suivent. Serait-ce l’inauguration ? Beaucoup viennent échanger, peu importe leurs connaissances en anglais souvent réduites à quelques mots. Ils aiment bien savoir d’où nous venons, où nous allons, si leur pays est beau… Il n’est ni nécessaire ni recommandé de développer les réponses, Fransa (France), Mardin et çok güzel (très beau) font très bien l’affaire et n’engagent pas dans des considérations que nous aurions du mal à suivre. Puis, tout à coup, arrivent plusieurs voitures et tout ce beau monde embarque, nous laissant seuls avec le pompiste ! Nous n’avons pas réussi à savoir ce qui se passait, un rassemblement ? un enterrement ? Ensuite, nous partons faire un tour en ville en voiture, histoire de voir s’il ne s’y trouverait pas un téléphone public pour donner des nouvelles avant de quitter la Turquie. Nous n’en voyons pas. La ville ne paraît pas bien riche, les voitures y sont moins omniprésentes que dans d’autres villes. Par contre, elle est densément peuplée, beaucoup de jeunes.

La route pour Mardin n’est pas longue maintenant. Nous quittons la route frontalière à Kızıltepe pour parcourir à vitesse réduite celle qui monte à Mardin afin de repérer le garage que j’avais localisé par ici à la maison avant de partir. Effectivement, à mi-distance, le voici, sur la droite. Mais, on dirait qu’il est ouvert. Un dimanche ? Bizarre. Un petit arrêt, pour voir. Il est effectivement ouvert, mais l’atelier est fermé. Un jeune homme tente de me renseigner sur l’heure d’ouverture le matin. Rien n’est sûr. Ensuite, nous montons dans la ville ancienne perchée sur le flanc sud de son rocher, prenons place au bord d’une falaise comme la dernière fois et partons la visiter à nouveau. Le principal changement est le ciel : aujourd’hui, un beau ciel bleu pur remplace le jaune du vent de sable que nous avions et dont la ville, telle un caméléon, prenait la couleur. Il n’en reste pas moins que ses belles demeures, ses mosquées et leurs minarets, ses escaliers, ses murs… qui utilisent tous la pierre du pays ont naturellement une couleur ocre voisine. Quel plaisir d’admirer ses plus belles constructions sur un fond de plaine ou de ciel pur ! Nous repassons un peu partout. Au bazar, si des magasins sont fermés, l’activité ne se ressent pas trop du jour de congé. C’est la seule ville que nous connaissons et dans laquelle une partie des denrées en vente sont transportées à dos de mules, c’est assurément plus pittoresque que des camions. Plusieurs échoppes offrant des services internet, nous allons voir si nous pouvons communiquer avec les enfants par Skype. Ce serait possible si, justement, l’électricité ne venait pas d’être coupée dans toute la ville, pas de chance. Nous retournons au camping-car et constatons, en passant devant une épicerie, que des lampes y brillent. Retour à internet, oui, cela fonctionne mais personne ne sait pour combien de temps, bien sûr. Appel, oui, nous aurons quelqu’un en ligne. La nuit a commencé à tomber lorsque nous en sortons. Nous nous hâtons parce que si l’électricité venait à être à nouveau coupée, nous aurions du mal à trouver notre chemin, même tout droit, le relief limitant la continuité du niveau du trottoir sans compter tout ce qui y est déposé devant les magasins. Ce soir, un peu de rangement et extinction des feux tôt pour aborder la suite.

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